Les émeutes urbaines d’octobre-novembre 2005 en France : comprendre avant de juger

par Alain Morice | publié le 31 décembre 2005 |

Ce texte, où certaines précisions pourront paraître inutiles à des lecteurs résidant en France, est destiné à un public étranger. Il a été rédigé après deux cours donnés devant des étudiants de l’Université Cà’Foscari de Venise et de l’Université autonome de Madrid, respectivement les 2 et 17 décembre 2005. Il est publié en italien par la revue Giano (Rome) et en espagnol par la revue Mugak (San Sebastian).

Alain Morice est anthropologue, chercheur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS, France). Merci pour ses précieux conseils à Bernadette Hétier, vice-présidente du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP, France)

Les images des émeutes urbaines survenues en France à la fin du mois d’octobre 2005 ont été diffusées sur les télévisions et dans les journaux du monde entier. Par delà la diversité des réactions, la presse internationale a fréquemment insisté sur leur caractère insurrectionnel, tout en soulignant avec sévérité la faillite de la politique française d’intégration de ses minorités issues de l’immigration, enfermées dans des ghettos suburbains, victimes de nombreuses discriminations, et ainsi en proie à des formes agressives de communautarisme. Dans certains pays limitrophes où l’immigration est plus récente, comme l’Italie ou l’Espagne, on s’est interrogé sur la question de savoir si des émeutes [1] semblables pourraient y avoir lieu - certains politiciens utilisant même une telle peur pour agiter des sentiments anti-musulmans, l’Islam étant supposé avoir sa part de responsabilité dans ce mouvement.

Les inquiétudes suscitées par ces émeutes ne sont pas fondement, dans un contexte européen où, de manière accélérée depuis le Sommet de Séville de juin 2002, les pays membres de l’Union européenne (UE) ont opté, à l’instar de la France, pour un durcissement de leurs politiques migratoires, diabolisant les migrants « irréguliers », ce qui renforce inévitablement les discriminations subies par l’ensemble des populations étrangères ou traitées comme étrangères. Sans qu’il soit possible de prévoir quand et sous quelle forme cela se manifestera, on peut cependant affirmer que dans toutes les situations où l’on aura laissé s’instaurer structurellement le mépris des droits, le racisme et la xénophobie à l’égard de certaines catégories de personnes, alors les rancoeurs ainsi accumulées seront potentiellement créatrices de révolte et de désordres publics. Un des thèmes favoris de l’extrême droite, à savoir la stigmatisation des allogènes, s’est répandu d’une telle manière en Europe, y compris dans la problématique des partis démocratiques, qu’actuellement aucun pays de l’UE ne peut prétendre se sentir à l’abri.

A propos de quatre « évidences » trompeuses

Cependant, le cas français reste actuellement singulier, et il a beaucoup étonné à l’extérieur. La plupart des jugements ont été exprimés de façon simplificatrice et volontiers idéologique, privilégiant l’aspect spectaculaire et faisant la part belle aux explications culturalistes et moralisatrices. Il y a donc un déficit de connaissance, s’agissant d’émeutiers à qui les médias n’ont pratiquement pas donné la parole pendant tous les événements et que peu de gens peuvent prétendre connaître en profondeur. Toute interprétation alternative nécessite beaucoup de modestie, afin d’éviter les clichés généralisateurs tels que les ont véhiculés les médias. Commençons par quatre remarques préalables.

1. D’abord, les émeutes d’octobre-novembre 2005 ne constituent ni un phénomène inattendu ni une nouveauté en France. Les professions en contact avec l’univers des « banlieues », « cités » et autres « quartiers difficiles » [2] (éducateurs, travailleurs sociaux, policiers), ainsi que de nombreux sociologues, ont depuis longtemps alerté les pouvoirs publics sur la situation explosive et la violence sporadique qui y règnent. Voici une sélection de quelques dates qui jalonnent une chronologie vieille de plus de 25 ans (cette chronologie est directement liée à la dégradation du climat social dans les « cités » autour des grandes villes) :
 1979, Vaulx-en-Velin (banlieue de Lyon) : premières émeutes avec voitures brûlées, premiers affrontements avec la police ;
 1981 et 1983, Les Minguettes (banlieue de Lyon) : les voitures sont sacrifiées lors de « rodéos », même scénario avec la police. Le ministre socialiste de l’Intérieur préconise le « choc salutaire » (emprisonnement des jeunes mineurs primo-délinquants) et cherche à retirer à la justice son droit de regard sur les actions policières. En mars 1983, l’extrême droite propage l’équation « immigration = délinquance » et remporte quelques victoires aux élections municipales. Plusieurs meurtres racistes demeurent impunis. En octobre-décembre, Marche pour l’égalité de Marseille à Paris, où de jeunes enfants d’immigrés sont reçus par le président de la République, qui promet une réforme libérale de la carte de séjour et le droit de libre association des étrangers. Chacun croit que « le problème des banlieues est résolu ».
 1990 (Vaulx), 1991 (Le Val Fourré - grande banlieue de Paris), 1993 et 1997 (Dammarie-lès-Lys - idem), 1998 (Toulouse) : émeutes et affrontements avec la police, généralement déclenchées par la mort de personnes lors de poursuites ou de contrôles policiers. Dans le cas de Dammarie (1997), entre autres cas, les policiers auteurs d’un meurtre à bout portant seront déclarés non coupables par la justice, en vertu d’une décision qui paraît avoir été conçue pour exaspérer les populations ;
 depuis 1999 : émeutes chaque année dans un nombre croissant de villes ; les incendies de voitures deviennent une tradition (pour aboutir progressivement à un total d’environ 20 000 voitures brûlées en 2004 et 28 000 durant les neuf premiers mois de 2005).

C’est donc à tort que l’on a pu se dire « surpris » par les émeutes de l’automne 2005. Cette fausse ignorance de réalités pourtant anciennes a servi de support à une culpabilisation des émeutiers et à l’improvisation de mesures répressives sans commune mesure, comme si subitement la république était en danger : la classe politique a pu ainsi faire oublier son aveuglement devant des réalités sociales aggravées depuis trois décennies.

2. Cependant, l’impression que ces émeutes étaient inédites, ressentie surtout par les observateurs éloignés, provient de la combinaison de deux réalités : d’une part elles ont fait l’objet d’une couverture médiatique sans précédent ; d’autre part, elles ont duré plus longtemps et ont concerné en même temps plus de villes, même petites, que les émeutes « habituelles » des années précédentes. D’une certaine façon, elles n’ont eu d’existence que par la publicité des médias : quand, après trois semaines, la police décida de ne plus publier le décompte quotidien des voitures brûlées, la presse commença à s’en désintéresser. La médiatisation à outrance a souvent fonctionné comme un piège pour les émeutiers, tenus ainsi de se montrer à la hauteur des sollicitations du voyeurisme ambiant et de continuer à allumer des feux. Cette instrumentalisation par la mise en scène spectaculaire est importante à comprendre car, si d’un côté elle rendait encore plus pesante l’absence de tout projet politique d’une jeunesse submergée par sa propre révolte, de l’autre elle mettait en évidence l’énorme déficit de reconnaissance sociale ressentie par cette jeunesse.

3. Cette révolte sociale n’a été ni préparée ni organisée. Dès le début, la thèse du complot a été avancée par le ministre de l’Intérieur, M. Sarkozy :selon ce point de vue, un petit nombre de caïds et trafiquants de drogue, dans le but de protéger leurs territoires face à l’intrusion des forces de police, auraient de longue date fomenté les émeutes en mobilisant une population jeune et désoeuvrée. Comme preuve d’organisation, les autorités ont été jusqu’à incriminer l’usage des téléphones portables et d’Internet, qui permettaient aux émeutiers de se rassembler rapidement. Notons que la thèse du complot, qu’aucun fait n’a pu confirmer, a été démentie le 23 novembre par les propres services de Renseignements généraux (RG) de ce ministre. Le Syndicat de la magistrature (composé de la frange la plus à gauche des juges) a quant à lui contredit la thèse officielle selon laquelle la majorité des émeutiers étaient « connus des services de police », selon l’expression habituellement utilisée pour salir des personnes accusées sans preuve.

Par contre, la police était manifestement préparée, puisque dès la première nuit d’émeutes elle s’est servie de flashballs, jusque là utilisées seulement par les brigades anti-criminalité. Cependant, il serait également erroné d’appliquer la thèse du complot à certains membres de la classe politique, dont M. Sarkozy lui-même. Certes, d’après les sondages de popularité effectués à la fin de novembre, ce dernier semble avoir tiré un certain avantage des événements. En outre, il a manifestement contribué à les provoquer par des propos qui ont été, à juste titre, reçus comme des offenses non seulement par les jeunes mais par l’ensemble de leur communauté. Le 20 juin 2005, à la suite d’un meurtre dans une ville de la région parisienne, il avait déclaré : « Je vais nettoyer la cité au Karcher [3] ». Le 25 octobre, soit deux jours avant les émeutes, répondant à une mère de famille, il avait déclaré devant les caméras de TV : « Vous en avez assez de cette racaille ? Eh ben je vais vous en débarrasser. » Le mot « racaille », qui est très injurieux, résume le mépris guerrier des autorités devant les enfants de l’immigration. Agissant en la circonstance comme pompier pyromane, M. Sarkozy a depuis longtemps estimé que le thème de l’insécurité lui était électoralement profitable. En outre la police, sous son règne comme ministre de l’Intérieur, n’hésite pas à user de termes insultants comme « macaques » pour parler des jeunes des « cités », et se sent protégée dans son arrogance et ses abus de pouvoir. Mais cela ne suffit pas pour réduire une révolte sociale aussi inévitable à l’effet d’une simple manipulation.

4. Sauf exception, les personnes qui ont participé activement à ce mouvement ne sont pas des immigrés : ce sont de jeunes enfants d’immigrés, de nationalité française pour la plupart. L’amalgame entre les immigrés et leurs enfants est en France une des armes favorites de la politique de stigmatisation des minorités. Lors des émeutes, M. Sarkozy a annoncé qu’on expulserait les étrangers qui y avaient participé, mais il n’a réussi à en faire arrêter que sept, et la justice a pour l’instant désavoué les mesures d’expulsion les frappant. Mais en traitant implicitement les émeutiers d’« étrangers », le ministre a sciemment ouvert la voie aux propos les plus belliqueux. C’est ainsi que le polémiste ultra-réactionnaire et raciste Finkielkrault a déclaré qu’il s’agit d’une « révolte à caractère ethnico-religieux » et que si ces jeunes ne se considèrent pas comme français et trouvent à se plaindre de la situation économique, ils n’ont qu’à aller dans les « pays d’où ils viennent » (rappelons qu’il s’agit de Français nés en France) : « Personne ne les retient ici. » Même l’extrême droite la plus radicale n’avait jamais publiquement préconisé le bannissement des minorités dans le pays d’origine de leurs parents, ce qui n’a pas empêché M. Sarkozy de louanger M. Finkielkrault, voyant en lui « un intellectuel qui fait honneur à l’intelligence française ».

Les événements ; les réactions : actes et discours

Les émeutes ont commencé le 27 octobre à Clichy-sous-Bois, près de Paris, quand trois jeunes, pour échapper à un contrôle de police, escaladent dans l’affolement les hauts murs d’un transformateur à haute tension pour y chercher refuge : deux d’entre eux périront électrocutés, le troisième est gravement brûlé et hospitalisé. Tout de suite, comme toujours en pareil cas, une mécanique de calomnie-désinformation est mise en marche par les autorités et relayée par les médias : selon la version officielle, la patrouille de police avait été appelée parce qu’on leur lui avait signalé que ces jeunes se livraient à un cambriolage sur un chantier de construction. Cette version sera démentie ensuite par le procureur et par le jeune survivant, mais le mensonge subsistera. Nous avons là de nos jours un facteur déterminant dans le déclenchement des émeutes urbaines en France  : consécutivement à un décès par mort violente causé directement ou indirectement par la police, seule la parole de la police est donnée pour vérité et transmise comme telle par les médias. Du côté des victimes, l’institutionnalisation du mensonge officiel tend à écarter toute idée de dialogue démocratique, de justice et de réparation, et ainsi à déclencher un processus de réactions violentes.

Pendant cinq nuits, Clichy sera le site d’une agitation (incendies de voitures et de bâtiments, attaques de transports publics, destructions diverses, affrontements avec la police) qui se répandra d’abord dans tout le département environnant de la Seine-Saint-Denis, puis dans de nombreuses villes de France à partir du 2 novembre. La nuit du 7 novembre présentera le bilan le plus lourd, avec 1 410 voitures brûlées et 400 arrestations environ. Le 8 novembre, le gouvernement décrète l’état d’urgence, qui sera prorogé pour trois mois par une loi du 18 novembre, alors que la situation est redevenue « normale » selon la police (moins de 100 voitures brûlées la nuit précédente).

Les réactions du gouvernement sont conditionnées par la compétition entre M. Sarkozy et le premier Ministre M. de Villepin, tous deux probables candidats du parti de la droite à l’élection présidentielle de 2007. Tandis que le premier ajustait son discours sur celui de l’extrême droite, le second a déclaré le 3 novembre : « La priorité est le rétablissement de l’ordre public car ces violences sont inacceptables, mais je veux aussi nouer un dialogue pour trouver des solutions adaptées, pour donner une place à chacun », avouant ainsi en quelques mots que les émeutes trouvent leur origine dans l’incompréhension et l’injustice sociales. De fait, les politiciens ont produit un discours mêlé :
 de fermeté : « les actes de vandalisme seront punis sévèrement » ;
 et de compréhension : « nous devons trouver des solutions aux problèmes des banlieues ».

Pratiquement, du côté gouvernemental, ce seront surtout les discours et les actes de fermeté qui domineront (mais il est vrai que la tendance à criminaliser les mouvements sociaux est actuellement devenue générale). Tandis que M. Sarkozy s’emploie à mettre de l’huile sur le feu en répétant à plusieurs reprises le mot « racaille », la machine judiciaire et répressive se met en marche.

1. Une justice expéditive et d’une sévérité disproportionnée  :
 les émeutiers présumés qui sont capturés sont traduits devant la justice en comparution immédiate, ce qui limite les droits de la défense ;
 une circulaire invite les parquets à « se mobiliser » et à utiliser toutes les qualifications possibles pour poursuivre les infractions : délit d’outrage, provocation à la rébellion, association de malfaiteurs, crimes en bande organisée ;
 un nombre important de mineurs sont emprisonnés (environ 100) ;
 les peines d’emprisonnement prononcées sont à la fois nombreuses, souvent excessives et prononcées sans le bénéfice du sursis, et en outre (signe d’une justice « pour l’exemple », qui plus est arbitraire et bâclée) très variables d’un tribunal à l’autre et d’une région de France à l’autre, en fonction du contexte local.

2. L’état d’urgence est instauré :
 prorogé jusqu’au 21 février 2006, l’état d’urgence est une mesure exceptionnelle, privative de libertés et ouvrant une voie légale à l’arbitraire administratif ;
 il permet notamment l’instauration du couvre-feu, l’interdiction des rassemblements, l’assignation à résidence des personnes tenues pour dangereuses, les perquisitions nocturnes à domicile, la limitation du droit de la presse (le tout hors du contrôle de la justice). Mais pour le moment, il n’a servi qu’à décréter le couvre-feu dans certaines communes et à interdire une manifestation de protestation contre... l’état d’urgence ;
 une loi d’avril 1955 institue un état d’urgence, notamment « en cas de péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public ». Elle a été utilisée à plusieurs reprises pour la répression des mouvements d’indépendance, algérien (1955, 1958, 1961) puis néo-calédonien (1984). C’est sous le régime de l’état d’urgence que plusieurs centaines de manifestants Algériens furent massacrés à Paris par la police lors de la nuit du 17 octobre 1961 : ce meurtre collectif sera très longtemps nié par les pouvoirs publics ;
 la problématique de l’état d’urgence est donc fortement chargée symboliquement : aux yeux des minorités et des démocrates, elle est à la fois synonyme de répression coloniale, de mensonge et d’impunité ; aux enfants d’immigrés venus des anciennes colonies, elle rappelle leurs origines et la soumission violente qui fut imposée à leurs parents. Comme par ailleurs son instauration n’a eu aucune utilité véritable en 2005 [4], on peut penser que cette loi d’exception a été mobilisée sciemment pour empoisonner une situation idéologique devenue délétère depuis quelques années, et prenant la forme d’un affrontement social de plus en plus ethnicisé.

3. Durcissement de la politique anti-migrations. Dans le cadre de la stratégie de l’amalgame minorités-étrangers, et profitant de la situation, le gouvernement a annoncé son plan de durcissement du contrôle de l’immigration en France, qui vise à rendre plus difficiles le regroupement familial, les mariages hors du territoire français et l’obtention du statut d’étudiant étranger ; le délai imposé aux conjoints avant de pouvoir demander la nationalité française doit être porté à 4 ans ; par contre, le délai de recours pour les demandeurs d’asile déboutés sera réduit à 15 jours, transformant ainsi la procédure de détermination du statut du réfugié en véritable loterie perdante.

Parallèlement, le gouvernement annonce un ensemble de décisions supposées résoudre les problèmes sociaux des banlieues, en particulier sur deux fronts : occuper les jeunes désoeuvrés ; lutter contre les discriminations. « L’année 2006 sera l’année de l’égalité des chances, comme grande cause nationale, afin que chacun trouve sa véritable place dans notre République », a déclaré le Premier ministre le 1er décembre 2005. Comme la plupart de celles qui ont été annoncées depuis une vingtaine d’années, ces mesures ont soit une simple fonction incantatoire (et, notamment en ce qui concerne l’accès des jeunes à de véritables emplois, elles ne seront suivies d’aucune mise en oeuvre efficace) ; soit pour conséquence d’offrir des ressources supplémentaires à la précarisation et la flexibilisation du travail dans le cadre de la politique ultra-libérale actuelle. Certaines d’entre elles vont même, si on les applique, renforcer la discrimination et la ségrégation que l’on prétend combattre. Parmi ces annonces, citons celles-ci :
 possibilité de mettre les enfants en apprentissage dès l’âge de 14 ans (fin de la scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans) ;
 augmentation du nombre de « zones franches » où, sous couvert de petites entreprises (filiales ou sous-traitantes), les grandes entreprises pourront à la fois bénéficier d’une remise d’impôt sur 50% des sommes investies et d’une déréglementation du droit du travail ;
 renforcement du pouvoir des élus locaux en matière de politiques sociales (mais aussi de lutte contre la délinquance), ce qui accroît la sensibilité de ces politiques aux anticipations électorales des politiciens.

Rappelons, pour situer cet ensemble d’actes et de déclarations d’intentions dans un contexte, qu’elles ont été prises dans un climat devenu très affectif, où tous les enjeux sociaux majeurs ont subi une forte ethnicisation. Les mesures gouvernementales suivent ou accompagnent des déclarations parfois violentes ou haineuses à l’encontre des immigrés et de leurs enfants, principalement ceux issus du continent africain. Proférées parfois par des personnes renommées et répercutées avec complaisance par les médias, certaines paroles ont tour à tour incriminé leur mentalité arriérée, leur refus d’apprendre ou de se servir de la langue française, leur polygamie (cause que les enfants ne seraient pas assez surveillés), leurs moeurs, leur parasitisme et en conclusion leur incapacité à s’intégrer à la République française. La presse est allée jusqu’à divulguer sans le critiquer un pseudo « sondage » d’opinion, effectué en novembre par un organisme sous tutelle du gouvernement, selon lequel presque 2 (« vrais ») Français sur 3 estiment que certains comportements « justifient une réaction raciste » - ce qui en termes clairs signifie que le racisme est considéré en haut lieu comme une idéologie « juste ».

En résumé de ce survol des événements d’octobre-novembre 2005, il est malheureusement possible de prédire que rien n’est terminé. Compte tenu, d’une part, des réactions essentiellement répressives et électoralistes adoptées par la majorité de la classe politique et par les médias et, d’autre part, de la croissante ethnicisation des positions en présence, cela risque de se reproduire sous des formes aggravées et de plus en plus désespérées si la révolte sociale qui couve en permanence ne débouche pas sur une proposition politique alternative viable.

Interprétation : la révolte d’une population qui n’existe pas
Genèse : la « deuxième génération, conséquence non prévue de l’utilitarisme migratoire.

La première explication des actuelles révoltes sociales urbaines actuelles est à chercher du côté de la politique de la France en matière migratoire. Cette politique est caractérisée par le cynisme, l’opportunisme, le déni du droit et le mépris des personnes. Quand elle a commencé à produire des réactions et des mouvements de révolte, dès lors la réponse a été l’incompréhension et la répression, et le climat s’est durci jusqu’à prendre la forme actuelle d’un conflit à forte connotation ethnique.

Contrairement à d’autres pays européens, notamment ceux du pourtour méditerranéen, la France est un très vieux pays d’immigration : elle a depuis plus de 150 ans importé des travailleurs étrangers à intervalles réguliers pour les faire contribuer à la production, aux opérations militaires et à la natalité. Même aujourd’hui, alors que depuis plus de trente ans toute nouvelle immigration permanente de travail est officiellement interdite, il entre chaque année un nombre d’étrangers qui paraît relativement stable. Une grande partie d’entre eux, contraints de se maintenir clandestinement sur le territoire français, sont harcelés par l’administration mais plus ou moins tolérés, car ils rendent de grands services à moindre coût aux employeurs de certains secteurs économiques, comme la construction et l’agriculture.

En juillet 1974, quand il est mis fin à l’introduction massive de main-d’oeuvre immigrée dans le secteur officiel, qui avait été la règle depuis la Libération de 1945, cette décision est prise, disent les autorités, à cause de la crise économique, qui limite l’emploi industriel et minier. Mais elle intervient surtout dans un contexte où les travailleurs immigrés sont de plus en plus combatifs et mènent des luttes assez dures, notamment sur la question du logement ; la revendication d’une vraie citoyenneté apparaît, tandis qu’en face les agressions racistes se sont multipliées. Deux mythologies sont mises en question : d’abord celle de l’immigré soumis et docile, prêt à endurer toutes les épreuves et les vexations pour nourrir sa famille restée au village et pour accumuler une épargne qu’il fera fructifier au pays ; ensuite, celle des « oiseaux de passage », selon laquelle, précisément, le migrant ne restera pas en France et retournera rapidement dans son pays - à cette époque-là, significativement, les xénophobes disaient souvent aux travailleurs arabes : « Si tu n’es pas content, tu n’as qu’à retourner chez toi ! » En particulier, les hommes jeunes et venus seuls, considérés comme des personnes de passage et sans importance, étaient entassés dans des « foyers » souvent insalubres et précaires.

Ce que ni les planificateurs, ni les employeurs, ni les politiciens n’avaient prévu, c’est que, en dépit de leurs mauvaises conditions d’existence et de travail, et malgré un fort racisme ambiant, un grand nombre (peut-être la majorité) de ces étrangers allaient non seulement rester en France, mais y créer une famille. Paradoxalement surtout après son interdiction, l’immigration de travail est aussi devenue une immigration de peuplement. Mais simultanément, ces travailleurs immigrés de la génération d’avant 1974 subiront de plein fouet les effets de la restructuration économique et seront massivement chassés des emplois industriels : ils participeront en première ligne au processus de précarisation et de flexibilisation des emplois, souvent en alternance avec le chômage ou le travail non déclaré. Leurs enfants, quant à eux, n’auront aucune place assignée dans le nouveau dispositif économique : pratiquement, ils se trouveront exclus du marché du travail encore plus que leurs parents. Ces enfants de l’immigration feront irruption sur la scène sociale et politique au début des années 1980. Au-delà de leur Marche pour l’égalité de 1983, ils seront montrés globalement du doigt, par un racisme croissant, comme rebelles, incapables de se discipliner au travail scolaire ou professionnel, délinquants et dangereux pour l’ordre de la société « française ». Désormais, c’est principalement sur eux que la traditionnelle stigmatisation de l’étranger va se reporter. On prend l’habitude de les nommer « deuxième génération » (d’immigrés), alors qu’ils sont nés en France, et ainsi de les désigner par leurs origines : c’est la mise en place d’un véritable stigmate héréditaire que, indirectement, l’utilitarisme migratoire a créé.

L’« intégration républicaine » : derrière les discriminations de fait, un slogan de mépris et de répression des minorités

A partir des années 1980, soucieux en paroles de « maîtriser les flux migratoires », les gouvernements successifs se fixeront une double ligne de conduite dans le cadre de la politique de fermeture des frontières commune à l’ensemble de l’Union européenne : d’un côté, « lutter contre l’immigration clandestine » pour, de l’autre côté « intégrer les étrangers qui sont sur place », et en principe leur assurer une complète égalité de traitement. L’« intégration » sera désormais au centre des discours et, dans la pratique, ce mot sera surtout synonyme de « devoir de s’adapter à la société française ». Mais les efforts de cette société pour donner une place aux étrangers et à leur descendance, en toute égalité, resteront lettre morte, si bien que l’intégration elle-même fonctionnera comme une mythologie, principalement utilisée comme prétexte pour réprimer les particularismes des minorités, jugés dangereux pour l’unité de la République.

Qui plus est, par un malentendu qui dérive directement de l’amalgame entre les immigrés et leurs enfants, le mot « intégration » sera, stupidement et irrationnellement, invoqué comme un objectif visant aussi ces enfants, qui ne sont pas des migrants et qui, en tant qu’ils sont français, n’ont pas plus de raison de se faire « intégrer » que les autres Français dont les parents sont nés en France. C’est en 1991 qu’un rapport officiel a défini le « modèle français d’intégration », à la suite d’une affaire qui avait amené les autorités à interdire en 1989 le port du voile islamique dans les écoles. Qualifié ultérieurement de « républicain », ce modèle s’est rapidement orienté vers une logique de suspicion à l’égard des particularismes religieux (musulmans surtout) et linguistiques : tout comportement pouvant évoquer le multiculturalisme américain est condamné comme « communautariste » et jugé dangereux pour l’unité nationale. En 2003, une loi impose aux étrangers qui veulent résider en France la signature d’un « contrat d’intégration » qui leur enjoint entre autres, de façon discriminatoire, de « respecter les lois et les valeurs de la République » et, peu après, un rapport officiel présente la non-maîtrise du français comme facteur de délinquance. En outre, depuis les attentats de New York du 11 septembre 2001, la religion musulmane est assimilée à un danger, tandis que précisément, faute d’être acceptés dans leur société de naissance, de nombreux jeunes se tournent vers une pratique plus assidue de l’islam. L’injonction d’intégration républicaine a ainsi acquis un contenu essentiellement répressif.

Par ailleurs, l’idéal d’intégration cache de moins en moins bien l’inégalité dans les faits. Comme la société française a fini par l’admettre à la fin des années 1990, les enfants de l’immigration subissent un ensemble de discriminations dans les domaines clés de la vie : habitat, éducation, emploi, loisirs. En particulier, aujourd’hui, la discrimination du marché du travail est tellement forte que, si un jeune qui répond à une offre d’emploi est domicilié dans un « quartier difficile » (de ceux où l’on brûle des voitures, par exemple), possède un nom arabe, ou est issu d’une filière scolaire jugée non noble, il n’a pratiquement aucune chance d’être embauché. Comme la preuve est difficile à apporter et comme la loi n’est presque pas appliquée, cette situation perdure. Deux autres discriminations sont également très mal ressenties : d’une part, l’interdiction (illégale mais fréquente) qui leur est faite de fréquenter certaines discothèques ; d’autre part, les contrôles de police « au faciès » (également interdits) dont ils sont sans arrêt victimes dans la rue et dans les transports collectifs, en raison de leur apparence physique qui en fait des suspects. A juste titre, tout cela est vécu comme un racisme omniprésent : de ce point de vue, les émeutes urbaines sont une réponse désordonnée à ce désordre toléré par la société dominante du pays.

Les minorités issues de l’immigration sont ainsi à la fois invitées à s’intégrer et constamment rappelées à leur condition inférieure : c’est ce que certains appellent une « injonction paradoxale », et il s’agit d’une manière de traiter les personnes qui est source de grande instabilité psychique, pouvant entraîner des réactions s’assimilant à la folie. En somme, il s’est instauré pour ces minorités une distorsion structurelle et durable entre le réel (ségrégation, discriminations, exclusion) et l’imaginaire (égalité de droits et des chances), ce qui fait que l’intégration républicaine fonctionne comme un discours vide de sens, qui s’ajoute aux injustices. Les gouvernements successifs, quelle que soit leur couleur politique, n’ont aucune excuse pour n’avoir pas voulu voir cette distorsion se développer sous leurs yeux. Quand, quelques années avant 2000, la ministre socialiste Aubry a lancé un vaste programme de lutte contre les discriminations, il était déjà trop tard, et de surcroît aucune volonté politique réelle n’est venue confirmer ses intentions. Rappelons que, malgré des promesses électorales faites il y a presque 25 ans, les étrangers (hors UE) résidant en France n’ont toujours pas le droit de voter.

De la disqualification à la haine

Cependant, un constat aussi désolant existe dans de nombreuses régions du monde, selon des variantes plus ou moins proches de l’ancien système sud-africain de l’apartheid. Après les émeutes, beaucoup de commentateurs ont évoqué la question sociale, le chômage, la ségrégation, l’exclusion etc. C’est vrai, mais cela ne suffit pas toujours à déclencher la violence. En France, un facteur qui a sans doute contribué notablement à créer une situation structurellement explosive est la mise en place d’un face à face permanent entre les jeunes et la police, conformément à l’orientation répressive des politiques sociales. Il semble que les pouvoirs publics, et même de nombreux spécialistes, aient complètement négligé les risques insurrectionnels contenus dans ces innombrables contrôles sans motif, exercés sélectivement contre une jeunesse repérée par la couleur de sa peau ou la plantation de ses cheveux, dans les lieux publics, sur son propre territoire, devant tout le monde, et cela par des hommes armés d’engins pouvant donner la mort. Lors des nombreux incidents consécutifs à ces provocations, se terminant parfois par la mort d’un jeune, les policiers ont pour consigne de se déclarer menacés par des délinquants dangereux, et seule leur parole est jugée digne de foi. Cette injustice est peut-être reçue comme aussi grave que toutes les autres : contre celle d’un policier, la parole d’un jeune enfant d’immigré ne vaut rien, - ce qui revient à dire que la société décrète que, quoi qu’il se soit passé, c’est un menteur. Telle est, non par hasard, la genèse de l’émeute du 27 octobre 2005 (et de beaucoup d’autres auparavant) : ayant envoyé deux jeunes à la mort, des policiers les traitent de délinquants ; implicitement, le survivant est montré comme un menteur, quand il explique que, contrôlés sans arrêt, ils ont tous trois pris la fuite dès qu’ils ont aperçu une patrouille de police.

Enfin, pour comprendre les comportements apparemment irrationnels des émeutiers, comme brûler les voitures des habitants de leur cité, incendier des écoles, attaquer des autobus, il conviendrait de regarder du côté des processus psychiques qui sont déclenchés par le face à face avec la police : des phénomènes tels que l’humiliation, le soupçon, la peur, la honte, montreraient sans doute comment la disqualification permanente, délibérée, gratuite et parfois sadique, de toute une jeunesse, vient se superposer inutilement à l’inégalité et au séparatisme quotidiens qu’elle subit en raison de ses origines. Pour justifier ces contrôles, est souvent invoqué le fait que certains d’entre eux sont des « caïds », voleurs ou trafiquants, en laissant ainsi se développer la condamnation d’un groupe social tout entier, qui plus est repéré par son appartenance ethnique. C’est sans doute pourquoi l’on a pu remarquer que les émeutes ont impliqué des jeunes en nombre important, bien au-delà des délinquants habituels, et rencontré de la sympathie chez les non participants, notamment les jeunes filles, voire les parents.

Outre qu’en allumant des feux, les émeutiers sont manifestement, sur le terrain qu’on leur laisse, à la recherche d’une reconnaissance qui leur est refusée, tous les comportements de manque de respect à soi-même sont, avant toute autre interprétation, la contrepartie de l’irrespect permanent dont ils sont victimes. Certains sociologues, eux-mêmes enfants de l’immigration comme A. Sayad, A. Boubeker, S. Bouamama, ont analysé avec finesse quelles contraintes pèsent sur les stratégies des minorités face à la domination. En s’inspirant de leurs travaux, on peut classer ces stratégies réactives très diverses autour de deux pôles : le retour du stigmate et la dissociation. Par retour du stigmate, il faut entendre tous les comportements et raisonnements qui reprennent à leur façon les marques stigmatisantes dont on est l’objet, de sorte que celles-ci paraissent devenir des caractères revendiqués. Ce retour peut être chargé d’un contenu désespérant, comme dans le cas de ces jeunes qui, par des comportements hyper bruyants et désinvoltes (que les sociologues progouvernementaux appellent « incivils »), cherchent à ressembler à l’image négative que la société se donne d’eux : c’est ainsi que l’injure « racaille » lancée par M. Sarkozy est depuis plusieurs années utilisée à usage interne par les jeunes, comme « nègre » aux Etats-Unis. Parfois, il s’agit d’un mécanisme d’identification voulu comme positif, comme c’est le cas pour le port du foulard islamique, qui s’est répandu chez les jeunes filles musulmanes comme emblème d’appartenance à un groupe qui se sait rejeté, quittant par là sa stricte signification religieuse. Bien sûr, par un cercle vicieux, les partisans du stigmate y voient la confirmation de leur théorie. A l’opposé, la dissociation s’analyse comme un ensemble d’efforts plus ou moins organisés et viables, pour se démarquer de l’image négative. On a souvent dit que, suivant ce modèle, la génération des immigrés avait déployé beaucoup d’énergie pour s’insérer dans la société française en restant silencieuse et inaperçue, et en valorisant des valeurs telles que l’honorabilité. Ce constat est sans doute trop général et exagéré, mais c’est précisément ce que reprochent certains jeunes à leurs parents, en les accusant d’avoir cédé à une injonction de déloyauté vis-à-vis de leurs origines ou de leurs traditions. Cependant, la dissociation peut prendre la forme plus pathologique de la haine de soi-même quand, faute de trouver une porte de sortie honorable pour contester la stigmatisation, toute une jeunesse se voit renvoyée sans arrêt à une image d’elle-même qu’elle ne supporte plus. Il y a là quelques clés pour interpréter les émeutes qui, en deçà des condamnations morales et du constat, certes navrant, de l’absence de perspectives politiques, nous incite à voir que la répétition de ces révoltes désigne à sa façon un terrible déficit de respect et de reconnaissance sociale de tout un groupe, risquant ainsi d’être rejeté dans une ethnicité sans issue : est-ce le but ?

31 décembre 2005

Notes

[1Le mot « émeute », sommossa en italien, n’a pas d’équivalent exact en espagnol - motín étant plus proche du français mutinerie, qui désigne une révolte à bord d’un bateau ou dans une prison. Quoique les Français l’utilisent parfois de façon péjorative, sa définition est grosso modo conforme à la morphologie des événements, à savoir un « soulèvement populaire, généralement spontané et non organisé » (Dictionnaire Le Robert).

[2Les mots « banlieues », « cités » et « quartiers » désignent couramment, par euphémisme et par métonymie, les jeunes personnes issues de l’immigration, plus particulièrement arabe et négro-africaine. Aucun de ces termes n’est très satisfaisant, et notons simplement que les espaces visés sont en général de véritables villes.

[3Karcher® est le nom d’une marque de machines à nettoyer sous haute pression.

[4Postérieurement à la rédaction de ce texte, l’état d’urgence a été levé par anticipation le 4 janvier 2006. Son application n’avait pas empêché l’incendie de plus de 400 voitures lors de la nuit du Nouvel an.

Alain Morice

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